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Eglise, vérité et humanité

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5 août 2023

LE RITE DE LA PAIX

 

  Dans la messe de Paul VI, les fidèles peuvent être invités à transmettre la Paix qui vient du Christ par un geste particulier adressé à la personne la plus proche. Ce geste à l’origine était celui de se donner les deux mains ou d’incliner sa tête sur l’une des épaules de son voisin tout en posant sa main sur l’autre. En l’absence de consignes bien définies, cela a pris la forme d’une banale poignée de main. Cependant, cette façon de faire est trop profane pour exprimer ce qu’il y a de sacré dans cet échange. Ensuite, au fil des années, l’habitude s’est prise de multiplier ces poignées de main avec toutes les personnes qui nous entourent et même davantage. Ce qui ne devait être qu’un moment relativement court mais vécu profondément et dignement a pris de l’ampleur dans le temps et dans l’espace et s’est transformé en quelque chose d’assez tumultueux. Il est même assez souvent accompagné d’un chant comme pour permettre à chacun de communiquer non pas seulement avec la personne à son côté mais avec un grand nombre. Le résultat, c’est que ce geste a perdu de son contenu spirituel et de sa véritable saveur. Il est devenu un geste furtif, bâclé, superficiel alors qu’il doit exprimer la grandeur et la beauté de la Paix qui vient du Christ Lui-même. Il arrive fréquemment qu’on le donne à une personne qui ne vous regarde déjà même plus parce qu’elle cherche un peu plus loin quelqu’un avec qui elle reproduira le même geste rapide. Cette attitude peut être source d’une vraie blessure dans le cœur dans la mesure où vous vivez profondément ce que vous faites et que c’est bien la Paix du Christ que vous vous apprêtez à donner et non un simple geste amical. Il n’est pas possible, en effet, de transmettre la Paix du Christ si l’autre tend sa main tout en vous quittant du regard. Le Christ ne se donne pas à moitié. Parole de mère Yvonne-Aimée de Malestroit : « Beaucoup humanisent le divin, mais bien peu divinisent l’humain ». Si je veux être cohérent avec le sens profond de ce rite, je vais l’accomplir de tout mon cœur, de toute mon âme en réalisant un beau geste d’amour avec mes mains et avec mes yeux.

  Au cours du synode sur l’Eucharistie (Oct. 2005), les évêques se sont penchés sur cette question. La proposition 23 dit : « Le salut de paix, dans certains cas, prend un poids qui peut devenir problématique, lorsqu’il se prolonge trop ou suscite même de la confusion précisément avant de recevoir la communion. » La Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements a publié en juin 2014 une circulaire La signification rituelle du don de la paix pendant la messe approuvée par le Pape François pour préciser aussi la pratique de ce rite. En voici les principaux éléments :

Sens théologique

  « Le signe de la paix se réfère à la contemplation eucharistique du mystère pascal. C’est le baiser pascal du Christ présent sur l’autel. Il est l’expression de l’Eucharistie, sacrement de la paix ». C’est la Paix du Seigneur lui-même qui se communique. Selon l’instruction Redemptionis Sacramentum de mars 2004, approuvée par saint Jean-Paul II, « cet usage n’a pas une connotation de réconciliation ni de rémission des péchés, mais il a pour but de manifester la paix, la communion et la charité (n°71) ».

Recommandation

  Benoît XVI, dans l’exhortation post-synodale Sacramentum caritatis, de février 2007 au n°49 : « Il a paru opportun -aux évêques- de modérer ce geste, qui peut prendre des expressions excessives, suscitant un peu de confusion dans l’assemblée juste avant la communion. Une sobriété est nécessaire pour maintenir un climat adapté à la célébration, par exemple, en limitant l’échange de la paix avec la personne la plus proche. »

Importance de cette question

  Selon la circulaire déjà citée, « il s’agit d’un point très important ». Nous sommes invités « à prendre soin de ce rite et à accomplir ce geste liturgique en faisant preuve de sens religieux et avec sobriété ». L’intention est de « mieux exprimer la signification du signe de la paix et réglementer les expressions excessives qui provoquent la confusion dans l’assemblée liturgique avant la communion ». « Lorsque l’échange de la paix est accompli de la manière qui convient entre les personnes, le sens et l’expression du rite lui-même en sont enrichis ».

  Le document insiste sur la « nécessité de proscrire définitivement certains abus » :

- 1 « L’introduction d’un chant pour la paix ».

- 2 « Pour les fidèles, le fait de se déplacer pour échanger entre eux le signe de la paix ».

- 3 « Pour le prêtre, le fait de quitter l’autel pour donner la paix à quelques fidèles ».

- 4 « Le fait que le geste de la paix soit l’occasion d’exprimer des congratulations, des vœux de bonheur ou des condoléances aux personnes présentes, dans certaines circonstances ».

  Pourquoi une telle sobriété est-elle demandée ?

  Afin de mieux comprendre, replaçons-nous dans le déroulement de la célébration. Nous venons de vivre la prière eucharistique. Celle-ci est offrande, sacrifice, louange, résurrection, rédemption, glorification du Christ. Jésus est là, présent. C’est le sommet et la source de notre vie chrétienne. Cela requiert tout notre cœur et toute notre attention. Vivre en vérité ce moment, c’est être orienté avec tout son être vers la Présence qui est à l’autel. C’est déjà le cœur à cœur de la communion qui se prépare. Chacun va recevoir l’Hôte divin. Le sentiment qui s’impose est celui de l’amour et de l’adoration. « Je voudrais raviver cette admiration eucharistique » exhortait saint Jean-Paul II dans l’encyclique Ecclesia de Eucharistia de 2003.

  Voilà pourquoi le rite de la paix ne doit pas prendre trop d’ampleur ni dans le temps ni dans l’espace. Il s’agit d’éviter une rupture dans cette démarche du cœur en profonde communion déjà avec la Présence du Christ à l’autel. Il ne doit pas, par son prolongement dans le temps, nous détourner de la Présence qui est là.

  Pourquoi limiter l’échange de la paix à la personne qui est juste à votre côté ?

  Ce n’est pas : tout le monde transmet à tout le monde. C’est : une personne transmet à une personne. La phrase que l’on est invité à dire est « la Paix du Christ soit avec vous ». Si j’ai vraiment reçu La Paix du Christ à travers le frère qui est à côté de moi, je n’ai pas besoin de la recevoir plusieurs fois. Vouloir multiplier les échanges, c’est faire comme si le premier avait manqué d’efficacité. Il est préférable de donner la Paix du Christ à une personne seulement mais de tout son cœur en prenant le temps de se regarder plutôt que de se dépêcher et de bâcler ce geste « sacré » pour passer à une autre personne puis encore à une autre et ainsi de suite. En outre, lorsque nous balayons du regard l’assemblée pour envoyer tel ou tel signe de loin, nous cherchons plus ou moins les personnes que nous connaissons alors qu’il s’agit de ne pas choisir mais de se tourner vers celui qui est à côté de moi. C’est bien la Paix du Christ que nous donnons et non notre propre paix. Le but n’est pas de donner une poignée de main, de se saluer ou d’en rester au témoignage de sa propre affection. A Rimini, en 1990, le cardinal Ratzinger avait dit : « Ce n’est pas d’une Eglise plus humaine dont nous avons besoin mais d’une Eglise plus divine ». Après avoir partagé avec une ou deux personnes la Paix du Christ, les fidèles, le cœur toujours rempli d’amour pour Lui, se tournent de nouveau sans tarder vers l’autel pour demeurer proche de Sa Présence réelle avant de Le recevoir au moment de la communion.

  Pourquoi le prêtre doit-il demeurer à l’autel ?

  Un commentaire de la Conférence épiscopale américaine (2000) précise qu’il s’agit « de ne pas rompre l’harmonie et l’élan du rite eucharistique ». Les explications précédentes s’appliquent donc autant sinon plus au prêtre lui-même. En outre, il n’est pas convenable et cohérent que la proximité physique et l’union du prêtre avec le Christ soit ainsi soudainement interrompue lorsque celui-ci quitte l’autel et semble ainsi « abandonner » la Présence réelle c’est-à-dire le Christ Lui-même pour échanger à son tour quelques signes de paix dans la nef avec des fidèles. Il est important que l’attention des fidèles ne soit pas détournée de la Présence à l’autel de Celui qui vient si humblement s’offrir à nous. Même si le Prêtre représente le Christ, même s’il est « un autre Christ », en quittant l’autel pour descendre la nef, il attire vers lui les regards et les détourne de la direction où se trouve le Christ. Il y a là comme une contradiction avec ce que la liturgie nous fait vivre en ce moment précis : être tout entier tourné vers le Christ pour se préparer à Le recevoir. « Tous, dans la synagogue, tenaient les yeux fixés sur Lui. » -Luc, 4,20- « Les regards fixés sur Jésus qui est le commencement et le terme de notre foi.» -Hébreux, 12,2-

  Pourquoi ne pas ajouter un chant pour la paix ?

  Toujours pour la même raison. Cela donne de l’ampleur à un moment de la liturgie qui doit demeurer orienté vers la communion. Notre attention ne doit pas être détournée de l’essentiel, c’est-à-dire du Christ Lui-même. Prendre quelques secondes pour se pencher vers son voisin le plus proche et échanger profondément avec lui la Paix du Christ qui nous habite ne provoque pas de rupture dans cette relation privilégiée au Christ si on revient aussitôt vers Lui. Par contre, la multiplication des échanges, peut produire une confusion et nuire à ce moment de grâce en remplaçant finalement ce qui est divin par ce qui est humain. En outre, le chant pour la paix qui ne fait pas partie de la liturgie prend parfois la place de l’Agneau de Dieu qui, lui, en fait partie. Or, l’Agneau de Dieu est une prière de miséricorde, belle et simple, qui est faite pour nous préparer à recevoir le don immense de l’Eucharistie en nous aidant à poser un acte d’humilité et de pauvreté. C’est un préjudice spirituel que d’en être privé.

  Une précision à propos de l’usage de ce rite : il s’agit d’un geste optionnel. « On peut l’omettre et, parfois, il doit être omis. »

  Des efforts devront tôt ou tard être entrepris indique la circulaire : « Il serait bon dans l’avenir de changer la manière de donner la paix, de remplacer les gestes familiers et les salutations profanes par des gestes appropriés », « de préparer des catéchèses liturgiques sur la signification du rite de la paix et sur la manière adéquate de l’accomplir ».

  Personnellement, j’ai pris l’habitude d’ouvrir discrètement mes deux mains l’une sur l’autre, comme un réceptacle, en direction de l’autel pour mieux signifier ma réception de la Paix qui vient du Christ et, ensuite, c’est bien avec ces deux mains que je La communique à mon voisin.

  Le document conclut en parlant d’ « un geste humain élevé jusqu’à la sphère du sacré ».

 

   NB : Rite de la paix et mesures sanitaires

Le problème s’est aggravé avec l’intrusion des mesures sanitaires dans le déroulement de la liturgie. Ces dernières, par leur démesure et aussi pour certaines par leur inconvenance, ont gravement nuit à la beauté et à la dignité des célébrations. Le rite de la paix, déjà bien mal pratiqué avant la crise sanitaire -et aussi psychologique- que nous avons connue, est encore plus problématique aujourd’hui. On voit un peu de tout : inclination du buste les mains jointes à la manière bouddhiste, saluts de la main en forme de petits coucous, baisers envoyés dans les airs à droite et à gauche, tête dodelinant dans toutes les directions… Il arrive aussi parfois que des frères refusent les mains qui leurs sont tendues par peur d’une éventuelle contamination ou peut-être plus simplement par application docile des anciennes consignes des gestes barrières. Il est important d’expurger le rite de la paix et aussi l’ensemble de la liturgie de toutes les transformations subies à la suite de ce qu’il y a eu d’excessif dans les mesures sanitaires parfois jusqu’à la folie.

 

Stanislas Grymaszewski  2016 et 2024

 

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5 mai 2020

L'EGLISE ET LA CHASSE AUX SORCIERES

    La chasse aux sorcières est un phénomène horrible qui a conduit de nombreuses femmes au bûcher. Dans l’opinion publique, cette image de la femme ainsi violentée est souvent associée à l’Eglise. La littérature, le cinéma, la bande dessinée ne manquent pas d’exemples pour conforter, en effet, l’idée que ce phénomène est dû à l’Inquisition médiévale menée par l’Eglise au plus profond d’un sombre Moyen-Age. C’est le cas, par exemple du film Le Nom de la Rose (1986), inspiré de l’œuvre (1980) d’Umberto Eco. Des ouvrages prétendument historiques comme l’Histoire de l’Inquisition de Lamothe-Langon (1829) et La Sorcière (1862) de Jules Michelet sont à l’origine de ce lieu commun. Cependant, il n’en est rien. Ce n’est pas au Moyen-Age. Ce n’est pas l’Inquisition. Ce n’est pas l’Eglise. Non seulement, l’Eglise n’a pas été l’actrice de cet acharnement contre des femmes, mais, bien au contraire, elle est intervenue comme nous allons le voir pour s’y opposer.   

Quelle époque ?

    D’abord, ce n’est pas un phénomène du Moyen-Age. Pendant plus de 1000 ans, il n’existe ni chasses ni bûchers pour les sorcières. Le premier cas signalé en France est celui de Jeanne de Brigue condamnée par le Parlement de Paris en 1391. Le cas de Jeanne d’Arc en 1431 reste un cas isolé. Elle est d’ailleurs accusée un peu de tout, pas spécialement de sorcellerie. Les vraies causes de son procès sont d’abord politiques et l’évêque Cauchon est au service des Anglais et des Bourguignons. De fait, l’obsession sanguinaire de la chasse aux sorcières est un phénomène moderne. Il apparaît vers la fin du XVème siècle pour se poursuivre pendant deux siècles environ. Il coïncide avec ce qu’on appelle la Renaissance et l’avènement de la Raison et des Lumières. Il y a deux grandes vagues : 1470-1520 et 1560-1650. L’épisode de Salem en Nouvelle Angleterre où vingt sorcières furent brûlées eût lieu en 1692. En France, les condamnations à mort pour fait de sorcellerie seront stoppées par un édit du roi Louis XIV en 1672. Le dernier bûcher signalé en Europe est daté de 1782 dans la Suisse réformée.

    Malheureusement, ce thème reste d’une grande actualité aujourd’hui dans de nombreux pays d’Amérique latine, d’Asie du Sud-Est et d’Afrique. Selon l’article Wikipédia-Allemagne : Persécution des sorcières, depuis 1960, plus de personnes ont vraisemblablement été exécutées ou lynchées pour sorcellerie que pendant toute la période des persécutions en Europe. En Tanzanie, par exemple, entre 10.000 et 15.000 personnes auraient été tuées.

Quelle ampleur ?

    En l’absence d’études sérieuses, les chiffres les plus extravagants ont été affirmés. Jusqu’à 9 millions selon Voigt (1786), Rosenberg (1930), Hans Kung (1985). Des auteurs comparent avec l’Holocauste. Dan Brown, dans le Da Vinci Code (2003), parle de 5 millions de femmes sur le bûcher en les attribuant à l’Eglise. Les études récentes des historiens s’accordent néanmoins pour estimer les condamnations entre 20.000 et 40.000. Behringer parle de 3 millions de personnes jugées dont 40.000 condamnées soit 1,5%. Il a été également établi que ce drame ne concernait pas que des femmes puisqu’on compte 20% d’hommes. Le foyer principal, toujours selon Behringer, a été de loin l’Allemagne avec près de ¾ des victimes.

 Durant le Moyen-Age, l’Eglise combat la peur de la sorcellerie et la chasse aux sorcières. 

    La peur de la sorcellerie et la pratique de brûler les sorcières existait avant le christianisme. C’est un héritage du paganisme. Le droit romain, par exemple, disposait que le sorcier devait être brûlé vif. Sylla (-138-78) a fait promulguer une loi qui punissait de mort ceux qui faisaient usage de la sorcellerie.

    Face à cela, l’Eglise est intervenue pour faire reculer ces croyances et a pris des mesures pour protéger les femmes qui en étaient victimes. Pendant tout le Moyen-Age, l’enseignement de l’Eglise qui fait autorité sur ce phénomène est le Canon episcopi du concile d’Arles (314). Ce document a fait disparaître peu à peu avec tolérance, scepticisme et même ironie un grand nombre de superstitions ténébreuses, y compris celles concernant les sorcières, dont les populations européennes avaient hérité de l’Antiquité païenne (1).

    Voici quelques faits illustrant l’action de l’Eglise :

- En 415, le peuple chrétien d’Alexandrie, encore habité par des croyances anciennes, lynche la philosophe Hypatie pour sorcellerie présumée. Les évêques indignés réagissent et parlent d’une « grande honte » inconciliable avec la foi (2).

- L’Edictus Rothari, code des lois du peuple lombard, christianisé au VIIème siècle, proscrit la mise à mort des sorcières (2).

- Les Germains païens, avant la christianisation, avaient pour habitude de brûler les sorcières ou de manger leur chair pour s’approprier leurs pouvoirs. Cette pratique était si répandue qu’après la victoire de Charlemagne elle dût être interdite sous peine de châtiment (condamnation à mort) par le Concile de Paderborn en 785 (2).

- Les Danois nouvellement christianisés, eux aussi, ne renoncent pas pour autant à persécuter les sorcières selon les coutumes ancestrales. Le pape Grégoire VII est résolument hostile. En 1080, il écrit au roi Harald : « Prends garde de ne pas pécher contre les femmes … condamnées à l’inhumanité en vertu d’une coutume barbare » (2).

- Jean de Salisbury, évêque de Chartres (XIIème) : « Le meilleur remède contre cette maladie (sorcellerie), c’est de s’en tenir fermement à la foi, de ne pas prêter l’oreille à ces mensonges et de ne point arrêter son attention sur d’aussi pitoyables folies » (3).

Pourquoi cette chasse aux sorcières ?

    La peur de la sorcellerie remonte à des temps très anciens. Elle est réveillée et amplifiée par les malheurs de l’époque : guerres, notamment civiles, épidémies. Elle correspond à une perte de la foi et à une décroissance de l’influence de l’Eglise catholique, à l’avènement du protestantisme et à un changement d’époque et de mentalité. Elle est le fait d’une population terrorisée par la peur du diable. On assiste à un phénomène de folie collective.

Quels sont les pouvoirs qui ont mené la persécution contre les sorcières ?

    Entre le XVème et le milieu du XVIIème, un changement profond marque l’Europe : l’affirmation des Etats modernes. La principale responsable des persécutions a été la justice des Etats et non celle de l’Eglise (2). Selon Decker, « l’empereur, les princes et les cités prirent en charge les persécutions » (2). Ce sont les tribunaux laïcs de l’Etat et non les tribunaux catholiques qui recueillent les dénonciations et qui mènent les procès. En France, il s’agit essentiellement de juridictions locales échappant en grande partie à tout contrôle du pouvoir central.

Quels sont les penseurs qui ont encouragé la chasse aux sorcières ?

    Ce n’est pas la hiérarchie catholique mais des membres de l’élite intellectuelle laïque de l’époque. On y trouve les penseurs de la Révolution anglaise : Coke (1552-1634), Raleigh (1552-1618), Bacon (1561-1626). En Angleterre, c’est durant la Révolution que la répression des sorcières atteint son apogée avec Hopkins (mort en 1647). Boyle (1627-1691) encourageait leur persécution. Hobbes (1588-1679), dans le Léviathan, assimile catholiques, magiciens et sorcières. Il estimait qu’elles recevaient un juste châtiment. Le champion intellectuel de la chasse aux sorcières est certainement Jean Bodin (1530-1596) qui demandait que les femmes soient brûlées aussi lentement que possible. Il est considéré aujourd’hui comme le penseur politique de l’Etat moderne et le théoricien de la tolérance religieuse (1). Il est l’auteur d’un manuel judiciaire pour la torture et l’extermination des sorcières : La Démonomanie (1580).

Kramer (1430-1505) et son ouvrage le Malleus Maleficarum (1486)  

   Le cas de Kramer est particulièrement intéressant. Il montre à quel point, en l’absence d’une connaissance exacte des faits, il est facile d’attribuer à l’Eglise un rôle inverse de celui qu’elle a eu en vérité.

    Kramer était un dominicain allemand qui obtînt de ses supérieurs et du Pape d’être nommé inquisiteur d’une province d’Allemagne. Il utilisa ensuite cette fonction pour mener une chasse personnelle aux sorcières mais se heurta à l’opposition des prêtres et des évêques. Il se retourna alors vers le nouveau pape mal informé de la situation et implora son aide. Innocent VIII (1484-1492) se laissa convaincre de l’existence d’une dangereuse « secte de sorcières » active en Allemagne du Sud et lui accorda une bulle, Summis desiderantes affectibus (1484), qui lui donna le pouvoir d’infliger des peines ecclésiastiques jusqu’à l’excommunication. Malgré cela, Kramer se heurta à l’évêque du lieu Golser et il dût renoncer une nouvelle fois à ses menées répressives. En réaction, Kramer écrivit un livre : le fameux Malleus Maleficarum, le Marteau des sorciers, c’est-à-dire le marteau pour écraser. Il s’agit d’un manuel de 800 pages pour les juges contre les sorciers et les sorcières. Cet ouvrage ne fût pas publié par l’Inquisition comme le laisse entendre Dan Brown dans le Da Vinci Code, mais par Kramer lui-même. Pour donner de l’autorité à son œuvre, celui-ci le fit précéder par la bulle de 1484. Cela pouvait laisser croire que le pape avait donné sa bénédiction, ce qui n’était absolument pas le cas. Très tôt, l’Eglise le juge d’ailleurs en contradiction avec les conciles et l’interdit en 1490. La tentative de Kramer de porter la sorcellerie au rang de l’hérésie pour la faire relever des compétences de l’Inquisition échoua donc lamentablement. Malgré cette condamnation, le livre remporte un énorme succès grâce à l’imprimerie. Entre 1487 et 1669, il sera réédité 34 fois (2). Cela confirme au passage le mythe tellement répandue de la toute-puissance de l’Eglise, mythe qui permet d’attribuer à l’Eglise tous les errements du passé.

L’impact du protestantisme

    Les régions protestantes sont particulièrement touchées : Etats allemands, Danemark, Scandinavie, Bohême. Les fondateurs de la Réforme étaient obsédés par la question du démon et la question du mal. Luther (1483-1546) consacre sa prédication aux sorcières le 06/05/1526 et appelle à cinq reprises à les tuer. Le 25/08/1538, lors de son sermon, il dit : « Vous ne devez pas avoir de pitié pour les sorcières, quant à moi, je les brûlerais toutes ». Calvin (1509-1564) s’est comporté en pyromane et a envoyé de nombreuses femmes au bûcher dans sa ville de Genève. Vers la fin du XVIème siècle, les protestants lançaient de terribles accusations contre la modération du Saint-Office. Cette modération était avancée comme une preuve de la complicité de l’Eglise de Rome avec les sorcières (1). Selon Decker, dans les régions luthériennes d’Allemagne, la part des femmes poursuivies était plus grande que dans les régions catholiques (2). Malgré cela, au cours des siècles suivants et jusqu’à nos jours, l’Eglise a été rendue responsable d’une grande partie des crimes et des bûchers installés par les protestants.

L’Eglise catholique a été l’acteur principal qui a protégé les femmes de la chasse aux sorcières.

    Selon Giovanni Romeo, « les autorités de l’Inquisition romaine évitèrent une persécution sanglante contre la sorcellerie » (1). En 1525, le pape Clément VII (1523-1534) intervient en personne pour sauver des femmes et des hommes accusés. Clément VIII (1592-1605) agit aussi pour la libération et la réhabilitation des femmes. Un document officiel du Vatican de 1621, écrit par le dominicain Scaglia, montre que l’Inquisition romaine intervenait en faveur des droits des femmes accusées de sorcellerie, qu’elle élevait la voix contre ces phénomènes d’hystérie collective et qu’elle condamnait en termes nets les pratiques courantes de leurs juges et de leurs bourreaux (2). Après les interventions de Paul V (1605-1621) et de Grégoire XV (1621-1623), il résulta que plus aucune sorcière ne fût condamnée dans la sphère d’influence de l’Inquisition romaine (2). Le pape Urbain VIII (1623-1644) recommande encore en 1637 la plus grande prudence dans la poursuite des sorciers et des sorcières (3).

    En Espagne, l’Inquisition usa de son pouvoir et de son influence pour mettre fin à la chasse aux sorcières menée par les foules et par les autorités séculières. Au lieu de brûler les sorcières, les inquisiteurs ont fait pendre certains de ceux qui les avaient condamnées au feu (4). Selon Léa (1825-1909), historien anticatholique, la persécution des sorcières a été « relativement inoffensive » en Espagne, probablement « grâce à la sagesse et à la fermeté de l’Inquisition » (4).

    Si l’Italie, l’Espagne, le Portugal et l’Irlande catholiques ont été très peu touchés par cette folie, il n’en reste pas moins vrai que des prêtres et des évêques catholiques ont été impliqués dans d’autres régions catholiques. A une époque où n’existaient pas les moyens de communication que nous connaissons aujourd’hui les instructions de la lointaine Rome restaient lettre morte dans une grande partie de l’Europe à commencer par l’Allemagne, lieu principal de ce fléau. Il ne faut pas négliger non plus ce fait si peu connu de l’opinion que, l’Eglise, dans de nombreux royaumes ou empires, était plus ou moins sous la domination du pouvoir temporel et que les charges d’évêque, par exemple, étaient attribués par ce pouvoir et non par les autorités de l’Eglise elle-même. Il était facile pour le pouvoir politique de choisir des personnes plus facilement à leur convenance que des personnes profondément religieuses. Néanmoins, d’après Decker, sur la totalité des victimes de la chasse aux sorcières, l’Inquisition catholique reste peu impliquée puisqu’on la retrouve dans moins de 1000 cas dont 200 rien que pour Kramer (2).

    Sources : (1) Revue 30 Jours n°6 (1990). (2) Michael Hesemann, Les points noirs de l’histoire de l’Eglise (2007). (3) Régine Pernoud, Pour en finir avec le Moyen-Age (1977). (4) Rodney Stark, Faux témoignages (2016). A signaler également l’ouvrage du danois Gustav Henningsen (1980) sur l’Inquisition.

  Stanislas Grymaszewski

26 janvier 2020

POURQUOI LE CELIBAT DES PRÊTRES ?

 Il est vrai que la discipline du célibat sacerdotal n'est pas exigée par la nature du sacerdoce, mais ses convenances avec celui-ci, pour des raisons à la fois théologiques et pastorales, sont tellement grandes que l'Eglise estime qu'elle ne peut y renoncer sans entraîner un grave appauvrissement de ce ministère et de sa fécondité. 

Quelles sont donc ces convenances qui justifient le maintien du célibat ? 

1) Le célibat permet au prêtre de ne faire qu'un avec le Christ

Il lui est plus facile de s'attacher ainsi à lui sans que son coeur soit partagé. Son offrande et sa configuration au Seigneur Christ n'en sont que plus parfaites. Le Christ est choisi comme Epoux exclusif. Le célibat devient alors un témoignage dans le monde, adressé à tous, que le Christ donne une plénitude et qu'il comble déjà totalement la vie.  

2) Le célibat permet au prêtre d'être comme le Christ

Le prêtre a pour vocation toute particulière de prolonger et de poursuivre dans le temps la mission du Christ qui est venu pour sauver tous les hommes. Dans la communauté des fidèles confiée à ses soins, il est le Christ présent. Il est un «autre Christ». Au moment de l'Eucharistie, il agit «in personna Christi». Par le célibat, le prêtre suit l'exemple du Christ et reproduit plus parfaitement en lui son image, rendant ainsi plus manifeste aux yeux des hommes l'offrande du Bon Pasteur.

  

3) Le célibat est un signe du Royaume de Dieu

La chasteté pour le Royaume des cieux est un signe particulier des biens célestes d'une grande valeur prophétique. Ce choix d'état de vie rend plus proche de la vie de tous les hommes le règne de Dieu à venir. Il porte au milieu du monde qui passe, l'annonce de la résurrection future, de la vie éternelle et de la vie d'union à Dieu.

  

4) Le célibat rend le prêtre conforme à Jésus-Christ, Epoux de l'Eglise

L'Eglise, comme Epouse du Christ doit être aimée par le prêtre de la manière totale et exclusive avec laquelle Jésus-Christ, Tête et Epoux l'a aimée. Le choix du célibat manifeste donc pleinement le don total et exclusif du Christ qui est l'Epoux à l'Eglise qui est l'Épouse.

  

5) Le célibat permet au prêtre d'être « père » pour tous

Le prêtre renonce à un amour personnel pour un amour universel. Son célibat est en vue de l'amour. Il est alors signe de l'amour de Dieu pour chacun. Quand on donne à Dieu, Dieu donne au centuple. En renonçant à une famille, le prêtre se voit recevoir par Dieu des familles, des enfants, des frères et sœurs au centuple. 

 

6) Le célibat donne au prêtre une plus grande efficacité pastorale

La vocation au sacerdoce ministériel exige de lui un don total, une consécration de sa vie entière. La vie conjugale et la vie familiale imposeraient au prêtre des exigences telles qu'il n'aurait plus la même liberté, la même disponibilité pour vivre en plénitude son sacerdoce et lui donner toute sa fécondité spirituelle. Il serait condamné à imposer des limites à sa vie sacerdotale en même temps qu'à sa vie d'époux et de père, ce qui entraînerait des insatisfactions pour tous.

  

7) La valeur du célibat sacerdotal est confirmée par la Tradition vivante  de l'Eglise

Certes, il y a eu des prêtres mariés durant les premiers siècles du Christianisme. A une époque où il était de coutume de se marier tôt, il n'était pas possible de faire autrement que de prendre des hommes mariés pour propager la Bonne Nouvelle. Il y avait nécessité. Les textes les plus anciens révèlent cependant que la continence était de rigueur après l'ordination. Par la suite, la discipline du célibat ne cessa d'être renforcée. La discipline de la continence des clercs, à l'origine de la discipline du célibat ecclésiastique, n'est donc pas le résultat d'une élaboration tardive, mais au contraire d'une tradition non-écrite d'origine apostolique.

  

8) Faire confiance à l'Esprit-Saint qui conduit l'Eglise

C'est l'Esprit-Saint qui conduit l'Eglise et qui l'a amenée à recevoir le charisme du célibat sacerdotal. Celle-ci a pu expérimenter au cours des siècles son importance inestimable. C'est pourquoi elle encourage chacun à y demeurer fidèle et à demander à Dieu de l'accorder toujours avec abondance. Les derniers papes, le Concile Vatican II et les Synodes des Evêques n'ont cessé d'exprimer avec clarté et force la ferme volonté de l'Eglise de rester fidèle à cet héritage malgré toutes les objections soulevées. Aussi ne contristons pas l'Esprit-Saint, ne participons pas à affaiblir l'unité et la mission de l'Eglise, en tombant dans le doute, mais sachons faire confiance et rendre grâce à Dieu pour un tel trésor, trésor dont l'Eglise a besoin pour le bien de sa mission dans l'avenir et pour tendre vers la civilisation de l'amour.

 Stanislas GRYMASZEWSKI

26 décembre 2019

EST-IL SOUHAITABLE QUE LA FONCTION DE SERVANTS D'AUTEL SOIT EXERCEE PAR DES JEUNES FILLES ?

 

 1/ Pourquoi cette question ?

Il est normal et utile que cette question soit posée car elle constitue parfois un sujet d’incompréhension et de division. Cette pratique est devenue habituelle dans certaines paroisses alors qu’elle est exclue en d’autres. Il semble également qu’il y ait une contradiction entre la pratique traditionnelle de l’Eglise et un texte de 1994 qui en admet pour la première fois la possibilité. S’agit-il d’un tournant et d’une porte ouverte dans laquelle il faut s’engager ou faut-il le comprendre autrement ? Quel est le sens exact de ce texte et quelle est donc aujourd’hui la volonté de l’Eglise ?

2/ Comment aborder cette question ?

Il importe de ne pas se laisser déterminer par sa propre sensibilité, par des préférences personnelles, par l’imitation de ce qui se fait ici ou là ou encore par l’air du temps mais par la recherche de la Volonté divine et par une attitude d’humble soumission à ce que l’Eglise demande. Il s’agit aussi de discerner ce qui est juste et bon en situant ce sujet par rapport au bien commun, par rapport à  certaines conséquences que cela peut entraîner à long terme, par rapport à l’éveil des vocations sacerdotales. Le souci de ce qui convient objectivement doit l’emporter sur ce qui peut plaire subjectivement.

3/ Quelle est la Tradition liturgique et canonique ?

Le texte le plus ancien dont nous disposons et qui s’y oppose est le canon 44 du Concile de Laodicée de 364. Dans l’Instruction Liturgicae instaurationes de 1970 de la Congrégation pour le Culte divin et la discipline des sacrements, il est rappelé que « selon les règles traditionnelles de l’Eglise, il n’est pas permis aux femmes de servir le prêtre à l’autel. » Dans une autre Instruction, confirmée par Jean-Paul II, Inaestimabile donum de 1980, on lit également que « la fonction de l’acolyte -celui qui sert à l’autel-  n’est pas permise aux femmes ». Cette tradition issue des premiers siècles s’est maintenue tout au long de la période médiévale et de la période moderne jusqu’à nos jours en Occident comme en Orient.

4/ Cette tradition peut heurter la mentalité actuelle

Notre époque revendique l’égalité et la parité homme-femme dans tous les domaines. On accepte de moins en moins qu’il y ait une distinction entre les hommes et les femmes au sujet des fonctions à exercer. En France, par exemple, le gouvernement s’alarme qu’il y ait si peu de femmes à faire une carrière militaire ! Les différences sont perçues comme des discriminations. De fait, il devient difficile aujourd’hui de comprendre et d’accepter que le service de l’autel soit réservé aux garçons et aux hommes. Il est nécessaire pourtant de saisir pourquoi cela fait partie de la Tradition de l’Eglise. Il y a certainement une vérité et une sagesse d’inspiration divine contenues dans cette pratique et cela doit nous guider.

5/ Comprendre la Tradition

L’autel est le lieu où s’accomplit le Sacrifice, célébré par le prêtre, agissant en lieu et place du Christ. Or, l’acolyte (celui qui sert à l’autel) est dans la mouvance des ministères ordonnés (évêque, prêtre, diacre). Le ministère de l’acolytat concerne très précisément l’Eucharistie. Avec le prêtre, près de l’autel, l’acolyte est en avant de l’assemblée, à l’image du Christ, Pasteur et Epoux. Le ministre ordonné, assisté par des servants qui peuvent être des ministres institués, est la figure du Christ. Le véritable motif qui a écarté de façon constante les femmes de l’autel est le lien qui unit le ministère de l’acolytat au sacerdoce au point d’ailleurs d’en constituer une étape au séminaire. Le masculin est signe du Christ, signe du prêtre, signe du Berger et de l’Epoux, une symbolique que la femme ne peut pas représenter. Les servants d’autel, même s’il ne s’agit pas de ministres institués, participent par leur proximité à toute cette symbolique. Il convient donc que ceux qui entourent le célébrant soient eux aussi des garçons ou des hommes afin de ne pas rompre la dimension symbolique du ministère ordonné représenté par le genre masculin. L’absence des femmes du service de l’autel n’a donc rien à voir avec les vestiges d’une culture ou d’une mentalité archaïque où la femme aurait été considérée comme inférieure et indigne par rapport à l’homme pour exercer cette fonction.

6/ La règle qui réserve le service de l’autel aux garçons et aux hommes est-elle modifiée ?

On pourrait être tenté de le penser puisque la Congrégation pour le Culte divin et la discipline des sacrements admet, dans une lettre adressée aux présidents des Conférences épiscopales (1994), que l’on puisse inclure le service de l’autel dans les fonctions liturgiques que les laïcs, hommes ou femmes, peuvent exercer. Il est cependant précisé qu’il y a des conditions à observer. Le document le plus récent sur ce sujet est le n° 47 de l’Instruction Redemptionis Sacramentum de 2004 : « Les filles ou les femmes peuvent être admises à ce service de l’autel, au jugement de l’évêque diocésain ; dans ce cas, il faut suivre les normes établies à ce sujet ».

En fait, il s’agit seulement d’une possibilité et non d’un encouragement et encore moins d’un droit des fidèles. Au plan juridique, ce n’est pas parce qu’une chose est possible en soi qu’elle est recommandée en fait. La lecture complète des rares documents de l’Eglise sur cette question manifeste qu’il y a des freins par rapport au changement et une préférence du magistère pour le maintien de la pratique traditionnelle. La lettre de 1994 l’indique : « Il sera toujours très opportun de suivre la noble tradition du service de l’autel confié à de jeunes garçons. On sait que ce service a permis un développement encourageant de vocations sacerdotales. L’obligation de continuer à favoriser l’existence de ces groupes d’enfants de chœur demeurera donc toujours ».

7/ Quelles sont ces conditions et ces normes à respecter indiquées dans le document de 1994 ?

a) La Conférence épiscopale doit d’abord donner un avis. Cet avis n’a pas été donné dans de nombreux pays dont la France.

b) L’évêque ne peut émettre un jugement prudentiel dans son diocèse qu’ « après avoir entendu l’avis de la Conférence épiscopale ». Cela n’a donc pas pu avoir lieu dans les diocèses français. Si l’évêque ne dit rien, c’est qu’il y a absence de jugement et donc d’autorisation explicite de sa part. La tolérance que nous constatons dans divers diocèses est interprétée par certaines personnes comme une autorisation de fait à l’admission des filles au service de l’autel. Cette position n’est cependant pas satisfaisante puisque l’Eglise sur ce sujet demande précisément autre chose qu’une simple autorisation de fait.

c) Un évêque qui ferait ce choix doit faire en sorte que « cela soit clairement expliqué aux fidèles à la lumière de la norme citée ». Il s’agit du canon 230 §2 du Code du droit canonique : « Les laïcs peuvent, en vertu d’une députation temporaire, exercer la fonction de lecteur dans les actions liturgiques ; de même, tous les laïcs peuvent exercer selon le droit,  les fonctions de commentateur, de chantre, ou encore d’autres fonctions ». Cela fait aussi défaut.

d) Les raisons qui pourraient amener un évêque à ce choix ne peuvent être que « des raisons déterminées selon les conditions locales ».  

e) Il ne pourra s’agir que « d’une députation temporaire » … « sans qu’il s’agisse d’un droit à exercer ».

f) « Le canon 230 §2 a un caractère d’autorisation et non de précepte. Par conséquent, L’autorisation donnée à ce sujet par quelques évêques ne peut nullement être invoquée comme imposant une obligation aux autres évêques ».

g) De plus, dans une notitiae du 27/07/2001 de la Congrégation pour le Culte divin, il est précisé que « même dans le cas où un évêque a accordé l’autorisation le prêtre a toujours la possibilité de ne pas prendre en considération ladite autorisation ». En clair, un prêtre ne peut pas se permettre de confier le service de l’autel à des filles lorsque la Conférence épiscopale n’a pas donné un avis favorable et lorsque son propre évêque n’a pas donné une autorisation. A l’inverse, il a le droit de s’y opposer même lorsque cela a été permis par son évêque.

 8/ Quel a été le contexte de la lettre de 1994 ?

 Une pratique qui se répand ne crée pas un droit et ne doit pas devenir nécessairement un modèle à suivre. La pratique des filles servantes d’autel s’est propagée avant le texte de 1994 au moment de la crise postconciliaire dominée alors par un climat de contestation par rapport à l’autorité de l’Eglise et à tout ce qui était héritage du passé. Il est permis de penser que celle-ci, non pour céder à une juste revendication mais plutôt pour éviter certaines tensions compte tenu de ce qui se faisait déjà ici ou là, a été obligé de composer avec la réalité et de permettre, nous l’avons vu avec des réserves et de façon très conditionnelle, l’accès des personnes féminines au service de l’autel. L’Eglise fait preuve de souplesse en permettant que cela soit possible mais cela ne signifie pas qu’elle souhaite que cette pratique s’étende davantage ni qu’elle s’installe définitivement. C’est l’esprit qui doit nous guider et non simplement la lettre. Un ministère n’est pas un DROIT mais un SERVICE. Tout ce qui relève des ministères n’est pas une question de droits à revendiquer mais de service et un service ne peut être imposé sous forme de pression revendicatrice.

9/ Discerner la volonté de l’Eglise en regardant aussi ce qui se fait à la chaire de Pierre et à la cathédrale

Il existe pour l’Eglise un autre moyen que l’enseignement pour faire connaître sa préférence. C’est celui de l’exemple donné lorsqu’elle agit au plus haut niveau. Pour en avoir connaissance, il suffit de regarder ce qui se fait liturgiquement à la basilique Saint Pierre à Rome, aux JMJ ou à l’occasion d’autres rassemblements internationaux en présence du Pape : les femmes, sauf exception, ne sont pas présentes pour le service de l’autel. De même, dans un diocèse, nous pouvons regarder ce qui se fait dans la cathédrale. Là aussi, les filles n’y remplissent pas la fonction de l’acolytat. Ce qui est pratiqué à Rome et dans la plupart des cathédrales est comme un enseignement du Pape et des évêques, adressé au Peuple de Dieu, pour lui indiquer un chemin à suivre.

10/ Ne pas favoriser la confusion au sujet du sacerdoce réservé aux hommes

 De nos jours, un certain nombre de personnes ne comprend pas que les femmes n’aient pas accès au sacerdoce. Il arrive que des catholiques contestent cette impossibilité au nom de l’égalité entre l’homme et la femme à tel point que Jean-Paul II a dû écrire en 1994 une lettre apostolique, Ordinatio sacerdotalis, pour rappeler que « l’Eglise n’a en aucune manière le pouvoir de conférer l’ordination sacerdotale à des femmes » et que « cette position doit être définitivement tenue par tous les fidèles de l’Eglise ». Le fait de voir des filles servir à l’autel peut être perçu comme une « ouverture » ou une « étape » en attendant d’aller plus loin. Cela peut nourrir la revendication de ceux qui souhaitent que les femmes puissent un jour être admises au sacerdoce. Il est possible aussi que la pratique du service de l’autel puisse faire naître chez une fille le désir d’être prêtre. Il ne faut pas blesser une petite fille, puis une jeune fille en laissant grandir en elle un désir dont on sait qu’il ne pourra pas se réaliser.  

11/ Il arrive que les filles prennent la place des garçons

A l’approche de l’adolescence, et même avant, les garçons d’une part et les filles d’autre part ont besoin de se retrouver entre eux et d’avoir des lieux propres pour se construire. C’est un âge de rivalité où les garçons ne se sentent pas toujours à l’aise en présence des filles. Le service de l’autel est précisément un lieu propre de construction pour le garçon. Néanmoins, le mélange avec les filles a eu pour résultat en certains endroits de faire fuir les garçons, les filles prenant alors leur place. On parvient ainsi à l’inverse du but recherché : permettre à de jeunes garçons, par le service de l’autel, d’entendre un éventuel appel à devenir prêtre. Pourtant, les vocations sacerdotales sont devenues rares et notre société malmène déjà beaucoup le rôle et la place de l’homme et du père. Si on veut favoriser l'éveil des vocations par le service de l'autel, il ne semble pas souhaitable de prendre le risque de mettre les garçons en concurrence avec les filles.

 12/ Suggestion

Avoir un rôle à tenir au cours de la célébration peut effectivement contribuer à ce que des filles se sentent plus concernées et cela peut les aider à participer à la messe dominicale. Les paroisses sont de plus en plus nombreuses à mettre en place un service spécialement pour les filles avec une appellation propre (« servantes d’assemblée », « servantes de Marie »), un lieu distinct dans l’assemblée et éventuellement une tenue particulière (cape). C’est une piste à approfondir …

13/ Quelle Eglise voulons-nous pour demain ?

Si l’on veut rester fidèle à ce que l’on reçoit de la Tradition, à savoir qu’il y a un lien entre le masculin, le service de l’autel, la prêtrise et les vocations sacerdotales (n°3,4,5), si l’on veut suivre la préférence exprimée par l’Eglise et respecter les normes qu’elle a édictées (n°6,7,8), si on se laisse enseigner par l’exemple donné par le Pape et les évêques, successeurs des apôtres (n°9) et enfin, si on veut éviter certaines conséquences ambigües ou préjudiciables (n°10,11), il devient assez évident qu’il n’est pas souhaitable d’encourager et de favoriser l’exercice du service de l’autel par les jeunes filles et qu’il est plutôt préférable de trouver d'autres moyens qui permettront une participation plus concrète des jeunes filles qui en manifestent le désir.

Stanislas GRYMASZEWSKI

 

3 janvier 2019

LA VIRGINITE DE MARIE «IN PARTU»

 

  Cette formule latine signifie que Marie est demeurée vierge, non seulement au moment de la conception du Christ en elle, mais aussi au moment de la naissance. La virginité est parfois confondue avec le dogme de l’Immaculée-Conception qui signifie, lui, que Marie a été conçue sans avoir été affectée par le péché originel.

  C’est le symbole d’Epiphane (374) qui apporte la première précision officielle sur la virginité perpétuelle de Marie : « Jésus-Christ … a été engendré parfaitement de sainte Marie, la toujours vierge, par le Saint-Esprit ».

  Puis vient la lettre de Léon Le Grand, pape et docteur de l’Eglise, universellement acceptée, dès son apparition, comme règle de foi (449) : « Jésus-Christ a été conçu par le Saint-Esprit dans le sein de la Vierge Mère, qui enfanta sans perdre sa virginité, comme sans perdre sa virginité, elle l’avait conçu ».

  Le Vème Concile œcuménique de Constantinople (553) parle expressément de la virginité perpétuelle de Marie.

  Le Concile particulier du Latran (649), présidé par le pape Martin Ier, déclare : « Si quelqu’un ne confesse pas, selon les saints Pères, en un sens propre et véritable, que Marie sainte, toujours vierge et immaculée, est Mère de Dieu … et a enfanté sans corruption, sa virginité demeurant non moins inaltérée après l’enfantement, qu’il soit condamné ». Cité par le Concile Vatican II, LG n°57 note 10.

  Paul IV (1555) : « Par notre autorité apostolique, nous requérons et avertissons de revenir sur leurs erreurs dogmatiques … ceux qui affirment … que la bienheureuse Vierge Marie n’est pas demeurée dans l’intégrité virginale avant, pendant et perpétuellement après l’enfantement ».

  Concile Vatican II (1965), LG n°57 : « La Mère de Dieu présenta dans la joie aux pasteurs et aux mages son Fils premier-né, dont la naissance était non la perte mais la consécration de son intégrité virginale ».

  Catéchisme de l’Eglise Catholique (1992) n° 499 : « L’approfondissement en la maternité virginale a conduit l’Eglise à confesser la virginité réelle et perpétuelle de Marie même dans l’enfantement du Fils de Dieu fait homme. En effet, la naissance du Christ n’a pas diminué, mais consacré l’intégrité virginale de sa mère. La liturgie de l’Eglise célèbre Marie comme la Aeiparthenos, toujours vierge ».

  CEC, n° 510, citant saint Augustin : « Marie est restée vierge en concevant son Fils, vierge en l’enfantant, vierge en le portant, vierge en le nourrissant de son sein, vierge toujours » : De tout son être, elle est la servante du Seigneur.

  Les Pères de l’Eglise ont exalté la virginité de Marie pendant l’enfantement comme étant le signe que cet enfant était vraiment Dieu.

  Saint Augustin (354-430) : « La grandeur même de la puissance divine … féconda l’utérus virginal … La même puissance divine tira l’enfant du sein virginal de la Mère … Nous reconnaissons que Dieu est capable de faire ce que nous confessons ne pas pouvoir expliquer. Dans ce sens, toute la raison du fait réside dans la puissance de Celui qui le fait ».

  Saint Thomas d’Aquin (1227-1274) indique trois raisons de convenance (Il convient mieux qu’il en soit ainsi) :

« La première prend en considération la nature propre de Celui qui naissait, le Verbe de Dieu. Notre verbe, à nous, c’est sans corruption qu’il est conçu dans notre cœur et qu’il en procède. En vue de prouver que le corps du Christ était celui du Verbe de Dieu lui-même, il convenait donc qu’il naquît du sein inviolé de la Vierge. On lit encore dans le sermon du Concile d’Ephèse : La femme, qui engendre une chair pure, cesse d’être vierge. Mais le Verbe de Dieu, né dans une chair, a gardé la virginité de sa Mère, démontrant par-là qu’il était vraiment le Verbe. Notre verbe corrompt-il notre esprit qui le produit ? Ainsi Dieu, Verbe substantiel, n’a pas détruit la virginité de la Mère, de qui il avait résolu de naître.

Une seconde raison est tirée du but de l’Incarnation. Le Christ, en effet, est venu pour ôter toute corruption. Convenait-il dès lors, qu’en naissant, il corrompît la virginité de sa mère ? Saint Augustin écrit, dans l’un de ses sermons : Celui qui naissait pour guérir la corruption ne pouvait aucunement ternir la pureté par sa naissance.

En troisième lieu, celui qui a ordonné d’honorer ses parents ne pouvait diminuer, en naissant, l’honneur dû à sa mère ».

La virginité perpétuelle de Marie est donc aussi une marque de délicatesse de la part de Dieu. Marie ayant fait vœu de virginité pour se consacrer au Seigneur, celui-ci lui a laissé cette virginité dans son intégralité, y compris dans ce qui en est le signe extérieur.

  La virginité perpétuelle de Marie est un dogme de foi. Si l’Eglise ne rentre pas dans le détail des conditions physiologiques de l’enfantement de Jésus, c’est à la fois par respect du mystère et à la fois par délicatesse envers ce qui appartient à l’intimité de Marie.

  En résumé, la virginité de Marie « in partu » est là pour attester la divinité du nouveau-né et pour laisser à Marie le signe sensible de sa consécration à Dieu.

Stanislas GRYMASZEWSKI

 

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1 décembre 2018

CREATION DE L'UNIVERS : SCIENCE ET FOI SE CONTREDISENT-ELLES ?

Question : La science et la foi s’opposent-elles sur le fait de savoir si l’univers a toujours existé, s’il est éternel ou s’il a un commencement, une création ? 

Ce que dit la science, l’histoire de la science

  Les savants, depuis l’Antiquité jusqu’au début du XXème siècle, affirment l’éternité du monde et de la matière : l’univers a toujours existé. Par exemple, Ernst HAECKEL (1834-1919), célèbre biologiste allemand, darwinien et spinoziste.  C’est l’idée aussi des philosophes comme SPINOZA, MARX ou NIETZSCHE. On est alors en contradiction avec l’idée de création ex nihilo révélée par la Bible et la foi chrétienne : l’univers a un commencement puisque créé par Dieu à partir de rien. Jusqu’à cette période, on pouvait parler d’une contradiction entre la science et la foi.

  De façon inattendue, la réponse de la science a radicalement changé au début du XXème siècle :

  - Alexander FRIEDMANN (russe), en 1922, présente la théorie d’un univers en explosion ou en expansion, d’un monde qui a commencé. En pleine révolution bolchévique, cette vision s’oppose totalement au matérialisme athée. Le monde n’est plus éternel. Il n’est plus statique. Il a une origine et court vers sa dégradation, explique-t-il. Aussitôt, Lénine sanctionne Friedmann comme traître à la Révolution. Il le radie des cadres de l’Université de Saint Pétersbourg au motif qu’il défend une théorie proche de la Bible. Le matérialisme, en effet, oblige à croire que la matière et le monde sont éternels.

  - Georges LEMAITRE (prêtre belge, 1894-1966), en 1927, à partir de la théorie de l’univers en expansion, explique qu’en remontant dans le temps, on atteint un instant initial où l’univers, l’ « atome primitif » tenait dans un grain de matière plus petit qu’une tête d’épingle. Ce « noyau primitif », un noyau d’hydrogène fantastiquement concentré et doué d’une énergie phénoménale se transforma en une formidable explosion initiale surnommée le « big-bang ». On estime la chaleur à 100 milliards de degrés au moment de l’explosion, puis à 6 milliards, une seconde après. La théorie a été injustement attribuée à Hubble.

  - L’idée invraisemblable du « big-bang » eût du mal à s’imposer par son caractère totalement révolutionnaire opposé à l’éternité du monde et de la matière et par le fait qu’elle était l’œuvre d’un prêtre belge, mathématicien de génie certes, mais notoirement méconnu. EINSTEIN (1879-1955) et HUBBLE (1889-1953) eux-mêmes prirent position contre dans un premier temps car ils ne pouvaient se détacher d’une vision statique et immuable de l’univers conforme à l’ancienne cosmologie grecque.

  - HUBBLE apporte cependant en 1929 le verdict de l’expérimentation en recueillant les premiers indices concrets d’une expansion de l’univers.

  - C’est Fred HOYLE (britannique né en 1915), un militant scientifique athée, qui inventa en 1960 l’expression « big-bang » qui signifie « grand boum » pour se moquer car il était partisan d’un univers immuable.

  - Paul DIRAC (britannique, 1902-1984, Prix Nobel 1933), l’un des pères de la physique quantique, vers la fin de sa vie, en 1972, estime : «  Il semble certain qu’il y eut un moment défini où se situe la création. » 

Conclusion

  Science et foi ne peuvent s’opposer pour la raison principale qu’elles ne traitent pas et ne se positionnent pas sur les mêmes sujets précis. Chacun a son domaine propre et il est sage ici de ne pas mélanger les genres. Néanmoins, la question de savoir si l’univers est éternel ou s’il a un commencement est bien une question commune et c’est peut-être d’ailleurs le seul cas, avec éventuellement la question du monogénisme et du polygénisme à propos de l’origine de l’humanité, où il en est ainsi. 

  Il se trouve que la Révélation biblique interprétée par le Magistère de l’Eglise enseigne que l’univers n’est pas éternel puisqu’il a été créé par Dieu. Cette vérité révélée, bien sûr, ne peut changer puisqu’elle a sa source en Dieu. Néanmoins, elle s’est trouvée en contradiction avec la science grecque, puis la science moderne et les philosophes matérialistes et athées. Cette opposition, si on met à part les savants et les philosophes chrétiens puisqu’ils admettent l’idée de création par leur foi, s’est perpétuée sur une durée de près de 2500 ans. Or, les choses ont soudainement changé en 1927 avec la découverte de LEMAITRE. La science admet aujourd’hui que l’univers dans lequel nous vivons avec ses milliards d’étoiles et ses millions de galaxies n’a pas toujours existé et qu’il y a bien un commencement exprimé par ce qu’on appelle vulgairement le « big-bang ». 

  Ainsi si la foi et la science ont été en totale contradiction pendant longtemps, cette dernière a ensuite évolué en modifiant complètement sa position. Résultat : la foi et la science ne s’opposent plus. Au contraire, ce que la science propose aujourd’hui comme hypothèse très probable, proche maintenant d’une certitude, à savoir que notre univers n’a pas toujours existé et qu’il  a un commencement,  est compatible avec l’idée de création, idée reçue par la Révélation biblique.

Stanislas GRYMASZEWSKI

28 août 2018

DE L'IMPORTANCE DE FAIRE SILENCE ET DE SE RECUEILLIR AVANT LE DEBUT DE LA MESSE

L’Eucharistie est « la source et le sommet de la vie chrétienne » (Vatican II, LG n°11). Pour le croyant, c’est un moment extraordinaire, « un coin du ciel qui s’ouvre sur la terre » dit Jean-Paul II (EE n°19). Aller à la messe, c’est aller à la rencontre de Dieu. Il s’agit d’une rencontre où Celui-ci parle à l’homme, d’une rencontre où Il le visite, d’une rencontre où chacun est appelé à vivre une union intime, un cœur à cœur. Tout au long de la messe, Dieu est à l’œuvre pour nous éclairer, nous élever, nous purifier, nous réchauffer, nous donner sa vie, nous transformer en son amour.

Un tel événement justifie une attention et une préparation toute particulière. C’est avec un cœur brûlant d’amour tout orienté vers Dieu que nous devrions entrer dans l’église. N’est-ce pas l’Amour qui nous attend ?

Le désir de nous préparer à cette rencontre peut nous amener à nous rendre à l’église un peu avant le début de la messe. Nous avons besoin, en effet, d’un peu de temps pour chercher le Seigneur et nous présenter à Lui. Il est utile de faire le ménage dans son imagination et parfois nous arrivons aussi avec notre fardeau ou notre péché qu’il est bon de déposer. L’église et son architecture dressée vers le ciel nous aide à nous tourner vers Dieu avec tout ce qu’elle expose à notre regard et qui nous parle de Lui : la croix, l’autel, les vitraux, les saints, un tableau … 

Au cours de la messe, nous avons à nous tourner vers Dieu de tout notre coeur et de toute notre âme. Successivement nous sommes appelés à louer Dieu, à nous reconnaître pécheur, à glorifier Dieu, à écouter Sa parole, à nous offrir, à nous unir, à rendre grâces.

La préparation à ce grand moment de rencontre demande que l’on prenne les moyens d’ouvrir son cœur. Pour y parvenir, nous avons besoin d’un silence intérieur qui lui-même n’est possible que par le silence extérieur. Or, aujourd’hui, cela est malheureusement devenu impossible car l’habitude s’est développée depuis pas mal d’années de parler dans les églises avant le commencement de la messe et de parler à voix haute comme on le fait avant un spectacle ou sur la place du marché. Les bavardages et les déplacements pour se saluer et échanger produisent un brouhaha bruyant qui rend impossible le recueillement nécessaire à la prière. Même si on prend une attitude de recueillement, même si on s’agenouille, rien n’y fait. Le bavardage est tellement banalisé qu’il est devenu la normalité et c’est celui qui essaye en vain de prier qui paraît anormal. L’habitude est tellement ancrée et tellement répandue que personne ne fait attention à celui qui prie. Comment expliquez une telle évolution des comportements : ignorance ou sans gêne ? On a oublié qu’il y a un temps et un lieu pour chaque chose. L’église n’est pas le lieu des bavardages et des mondanités, mais le lieu de la prière et de la rencontre avec Dieu et cela encore plus lorsqu’une messe va avoir lieu. Il n’est pas normal d’avoir à renoncer à prier avant le début de la messe. Il est vital spirituellement de redonner le sens du sacré, de la prière, de la primauté et de l’adoration dues à Dieu lorsqu’on pénètre dans une église.

Le Pape François s’est exprimé sur ce sujet au cours de l’Audience Générale du 15/11/2017 : « Quand nous allons à la messe, peut-être arrivons-nous cinq minutes à l’avance et commençons-nous à bavarder avec celui qui est à côté de nous. Mais ce n’est pas le moment de bavarder : c’est le moment du silence pour nous préparer au dialogue. C’est le moment de se recueillir dans son cœur pour se préparer à la rencontre avec Jésus. Le silence est très important ! Nous n’allons pas à un spectacle, nous allons à la rencontre du Seigneur et le silence nous prépare et nous accompagne. Rester en silence avec Jésus. Et du mystérieux silence de Dieu jaillit sa Parole qui résonne dans notre cœur. » Dans la Présentation Générale du Missel Romain on peut lire la demande suivante : « Déjà avant la célébration elle-même, il est bon de garder le silence dans l’église, à la sacristie et dans les lieux avoisinants, pour que tous se disposent à célébrer les saints mystères avec cœur » (PGMR n°45).

Peut-être avons-nous perdu le sens de ce que nous célébrons ? François nous rappelle alors l’essentiel : « La messe est le mémorial du mystère pascal du Christ. Elle nous rend participants de sa victoire sur le péché et la mort et donne sa pleine signification à notre vie … L’Eucharistie nous conduit toujours au sommet de l’action du salut de Dieu. Le Concile Vatican II affirme : Chaque fois que le sacrifice de la croix, par lequel le Christ, notre agneau pascal, a été immolé, est célébré sur l’autel, l’œuvre de notre rédemption s’effectue … Chaque célébration de l’Eucharistie est un rayon de ce soleil sans couchant qu’est Jésus ressuscité. Participer à la messe, en particulier le dimanche, signifie entrer dans la victoire du Ressuscité, être éclairés par sa lumière, réchauffés par sa chaleur. À travers la célébration eucharistique, l’Esprit Saint nous rend participants de la vie divine qui est capable de transfigurer tout notre être mortel. À la messe, nous sommes avec Jésus, mort et ressuscité, et il nous entraîne vers la vie éternelle. À la messe, nous nous unissons à lui. Ou plutôt, le Christ vit en nous et nous vivons en lui … Si nous le recevons avec foi, nous aussi nous pouvons vraiment aimer Dieu et notre prochain, nous pouvons aimer comme il nous a aimés, en donnant sa vie. Si l’amour du Christ est en moi, je peux me donner pleinement à l’autre … Quand nous allons à la messe, c’est la même chose que si nous allions au calvaire. Quand nous entrons dans une église pour célébrer la messe, pensons à cela : j’entre au calvaire où Jésus donne sa vie pour moi. Et ainsi, le spectacle disparaît, les bavardages disparaissent, les commentaires et ce genre de choses qui nous éloignent de cette chose si belle qu’est la messe, le triomphe de Jésus. La messe, c’est revivre le calvaire, ce n’est pas un spectacle. » (AG du 22/11/2017)

Ces dernières décennies, dans nos assemblées, l’humain a pris le dessus sur le divin et cela est préjudiciable spirituellement. Certes, nous allons aussi à l’église pour rencontrer des amis, des frères et la charité doit s’exercer à l’égard du prochain. Mais, il ne faut pas inverser l’ordre des choses. Personne n’est la Source de l’Amour. Et c’est en buvant de toute son âme à la Source qu’est Jésus que nous progresserons dans l’amour. Il est donc clair que nous devons donner la priorité à Dieu. Plus notre cœur sera saisi et purifié mieux nous aimerons. Nous avons ensuite toute la semaine pour nous retrouver et échanger et cela peut commencer sur le parvis de l’église à la sortie de la messe.

Nous devons penser à nos prêtres. Eux aussi ont besoin de demeurer dans un certain silence pour rester uni au Christ et se préparer à célébrer dignement, à enseigner la Parole de Dieu, à être instrument docile de l’Esprit-Saint et témoin de son Amour miséricordieux. Le brouhaha qui règne dans les églises avant le commencement de la messe ne les aide pas dans leur propre recueillement.

Nous devons penser tout autant à ceux qui sont de passage, à ceux qui sont en recherche. Il y a peut-être des personnes éloignées de l’Eglise dans nos assemblées et qui ressentent comme un appel de Dieu à l’intérieur d’elles-mêmes. Nous devons alors nous interroger sur le contre-témoignage que peut constituer notre désinvolture face à ce qui est sacré et face aux mystères de notre foi. N’oublions pas également les enfants qui observent. Par notre attitude, nous leur suggérons des pensées qui peuvent les éloigner ou les rapprocher de Dieu. Je me souviens avoir été impressionné au cours d’une messe lorsque j’étais enfant par un homme d’une grande taille qui priait debout en gardant les yeux fermés. J’avais été profondément édifié par ce signe visible d’une personne qui priait et qui apportait ainsi un témoignage de foi. Dans l’assemblée, Il peut y avoir aussi des esprits sincèrement critiques et sceptiques qui se posent légitimement des questions  sur ce qu’ils perçoivent de notre foi et de notre spiritualité. Il y a les personnes d’origine musulmane de plus en plus nombreuses dans notre pays. Elles ont un sens du sacré et de la transcendance souvent plus développé que nous. Parmi elles, certaines éprouvent un attrait pour Jésus-Christ et pour un Dieu plus proche et plus intime. Il y a tous les incroyants. Quel spectacle leur donnons-nous lorsque nous nous agitons ainsi avant de célébrer la gloire de Dieu et les plus grands mystères de notre foi ? De quoi témoignons-nous ? Est-ce Dieu ou l’humain qu’ils voient dans nos églises ?

Stanislas GRYMASZEWSKI

14 avril 2018

QUE SIGNIFIE LE DJIHAD ?

  Djihad : combattre, faire effort pour la cause de Dieu.

  Contrairement à une idée répandue, ce combat n’est, dans le Coran, que de nature militaire. Le Coran sacralise la violence en tant que moyen d’étendre le règne de Dieu par l’expansion de l’islam. Pour comprendre l’importance de la guerre, il faut savoir que c’est Dieu qui demande de combattre. C’est lui qui accorde la victoire aux croyants et châtie les incroyants. Le djihad fonctionne en faisant miroiter une double récompense : une terrestre, le butin (c’est d’ailleurs le titre d’un chapitre entier du Coran) et une céleste, celui qui meurt au cours de la guerre sainte va tout droit au paradis. A titre de comparaison, il est utile de savoir que l’Eglise n’a jamais déclaré martyr un chrétien mort les armes à la main. Le martyr chrétien offre sa vie mais ne prend jamais la vie d’un autre.

  500 versets du Coran traitent du djihad. Le verbe qatala qui veut dire tuer est attesté 170 fois. L’ordre de tuer et de combattre revient 19 fois à propos des conflits qui s’échelonnent de 622 à 632.

  Selon l’islam, le monde est divisé en deux parties : le Dar el-islam (pays de l’Islam) et le Dar el harb (pays de la guerre). Concernant la deuxième partie, les mahométans jouissent du droit de lancer des raids militaires, de réduire les populations à l’esclavage ou de s’emparer de leurs biens.

  En 622, Mahomet fuit La Mecque pour Médine. C’est là qu’il met au point sa doctrine et qu’il décide de l’imposer par le djihad. Le Coran et la Sunna (Tradition) se font l’écho très largement des batailles militaires, assorties de prises de butin, organisées par Mahomet lui-même. En 630, il prend La Mecque, fait abattre toutes les idoles et impose la religion nouvelle.

  Ce n’est qu’au XIème siècle que des courants mystiques donneront une interprétation plus spirituelle au djihad, en prônant la lutte contre les mauvaises tendances, l’effort pour purifier le cœur humain et la société. C’est ce qu’on appelle le grand djihad. Cette interprétation est le propre des mystiques. Elle ne figure pas dans le Coran. Elle a probablement été favorisée par le contact avec la spiritualité chrétienne. Aujourd’hui, la notion de lutte pour l’extension de l’islam y compris par des moyens pacifiques prévaut de plus en plus dans le monde musulman.

 

29 mars 2018

ELI, ELI, LAMA (LEMA) SABACHTHANI !

« Mon Dieu ! Mon Dieu ! Pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Matthieu 27,46 et Marc 15,34).

  Cette phrase veut-elle dire que Dieu le Père a abandonné Jésus-Christ ?

  La foi, reçue des Evangiles, nous dit que Jésus-Christ est Dieu. Il est Fils de Dieu : « Il est Dieu, né de Dieu ; Lumière née de la Lumière ; Vrai Dieu, né du vrai Dieu ».

  L’amour, l’intimité et l’unité entre le Père et le Fils sont parfaits. Cela nous est enseigné tout au long de l’Evangile : « Celui qui m’a envoyé est avec moi et Il ne m’a pas laissé seul, parce que je fais toujours les œuvres qui lui sont agréables » (Jean 8,29). « Moi et le Père, nous sommes Un » (Jean 10,30). « Le Père est en moi et je suis dans le Père » (Jean 10,38). « Père Juste ! Le monde ne vous a point connu ! Mais moi, je vous ai connu, et ceux-ci ont compris que vous m’avez envoyé. Je leur ai manifesté votre Nom. Je le leur ferai connaître encore, afin que l’amour dont vous m’avez aimé soit en eux, et que moi-même je sois en eux » (Jean 17,25-26).

  Dieu s’est fait homme en Jésus-Christ pour nous apporter le salut. La vie et la mission du Christ ont été annoncées par les prophètes. Le Christ vient donc parmi nous et réalise ce qui a été annoncé plusieurs siècles avant sa naissance. De nombreux passages de l’Ancien Testament y font allusion. Le Christ accomplit les Ecritures. Ainsi, les dernières paroles qu’Il prononce sur la croix sont des paroles que nous trouvons dans les Psaumes. Par exemple, peu avant sa mort, Il dit : « J’ai soif » (Jean 19,28) et les soldats lui donnent à boire. Or, le Psaume 69,22 dit : « Ils m’ont donné du vinaigre pour apaiser ma soif ». De même, avant d’expirer, Il dit : « Père, je remets mon esprit entre tes mains » (Luc 23,46). C’est précisément ce que dit le Psaume 31,6 : « Entre tes mains, je remets mon esprit ».

  Nous arrivons maintenant à cette phrase du crucifié qui surprend tellement. Nous la retrouvons, elle aussi, intégralement au Psaume 21. C’est une nouvelle fois l’accomplissement des Ecritures. D’ailleurs, aussitôt après, il dira : « Tout est consommé » (Jean 19,30). Cette phrase ne signifie pas que le Christ soit abandonné du Père. Nous pouvons confirmer cela en reprenant le Psaume 21 et en lisant l’un de ses versets, le verset 25 : « … car Il n’a point (le Père) méprisé, ni dédaigné la pauvreté du Pauvre (il s’agit du Christ), ni caché de Lui sa face, mais invoqué par Lui, Il écouta ». Il ne faut pas croire non plus que l’unité entre le Père et le Fils ait été brisée, ni que le Fils ait pu douter du Père. En effet, sa toute dernière parole est celle-ci : « Entre tes mains, je remets mon esprit ». Remet-on son esprit à quelqu’un qu’on estime nous avoir abandonné ?

  Il n’en reste pas moins que le Christ parle d’abandon. Quel sens devons-nous donner à ce mot ? Le Christ est Vrai Dieu. Il est aussi Vrai Homme. Il assume notre condition humaine dans sa totalité, hormis le péché. Sur la croix, il est humainement brisé, anéanti, délaissé. Il est abandonné aux hommes, à ses bourreaux. Il voit la mort approcher. Il éprouve l’abandon que peut éprouver tout homme à ce moment-là. Le Christ accepte cette dernière épreuve pour être encore plus solidaire de notre humanité.

  Saint Hilaire explique que : « La plainte de l’abandonné vient de cette infirmité qui va à la mort. Vous avez dans cette plainte d’être abandonné, la preuve qu’Il est un homme ». Il ajoute : « Et vous avez en ce que en mourant, Il proclame qu’Il règne dans le Ciel, la preuve qu’Il est Dieu ». Saint Hilaire fait allusion à cette phrase du Christ au bon larron : « En vérité, je te le déclare, aujourd’hui même, tu seras avec moi dans le Paradis » (Luc 23,43).

  Sur la croix, le Christ porte aussi tous nos péchés. Or le péché est ce qui sépare l’homme de Dieu. Notre propre péché peut nous faire croire que nous sommes abandonnés de Dieu. Le Christ accepte de vivre cet abandon par amour pour nous et par obéissance envers le Père. Son cri vers le Père doit nous ouvrir les yeux sur notre propre péché et nous en faire ressentir toute la misère.

Stanislas GRYMASZEWSKI

 

28 mars 2018

A QUOI CELA SERT-IL DE CROIRE ?

Croire, au sens chrétien, c’est avoir la foi. Mais qu’est-ce que la foi ?

1 La foi est d’abord un don de Dieu. C’est Dieu qui vient toucher notre cœur et éclairer notre intelligence pour que nous puissions prendre conscience qu’Il est là et qu’Il nous aime. Ce n’est pas l’homme qui se donne la foi. Celle-ci est d’abord une initiative de Dieu. On emploie le mot grâce pour désigner cette initiative. La foi est le fruit d’une action progressive, patiente et aimante de Dieu dans notre âme. « Votre foi repose non pas sur la sagesse des hommes, mais sur la puissance de Dieu » dit saint Paul (1Co 2,5). « La foi est un don de Dieu à demander dans une prière ardente » dit également Jean-Paul II (Bénin, 1982).

2 La foi n’est pas une simple opinion que je me fais au sujet de Dieu. C’est une certitude qui s’impose à moi suite à une expérience intérieure. Lorsque j’ai fait l’expérience de la présence et de l’amour de Dieu, je ne doute plus de son existence.

3 Croire au sens chrétien, ce n’est pas simplement croire en l’existence de Dieu. C’est croire aussi que Dieu est Père, qu’Il est créateur du ciel et de la terre, qu’Il a envoyé son Fils, Jésus-Christ, parmi nous, pour prendre notre condition humaine et pour nous sauver du péché et de la mort éternelle. C’est croire qu’Il nous donne son Esprit par sa Parole dans l’Ecriture Sainte et par les sacrements, notamment celui de l’Eucharistie. C’est croire qu’Il peut changer notre vie pour la rendre plus belle. C’est croire qu’Il a fondé l’Eglise pour nous rassembler en une grande famille et pour nous guider vers la Vérité. C’est croire que nous sommes appelés à ressusciter avec notre propre corps et à vivre éternellement en intimité avec Lui.

4 La foi nous ouvre ainsi au don de Dieu. Ce don est infini. Il dépasse tous les biens matériels que nous pouvons acquérir au cours de notre vie terrestre. La foi nous ouvre sur une vie d’une grande intensité et d’une grande richesse qui nous saisit tout entier : « Nous savons et nous soulignons que, lorsqu’on reçoit le Christ par la foi, lorsqu’on fait l’expérience de sa présence dans la communauté et dans la vie personnelle, des fruits sont produits dans tous les domaines de l’existence humaine, écrit Jean-Paul II dans Euntes in mundum (1988).

5 La foi authentique est active et transforme notre vie quotidienne en nous communiquant une vie nouvelle qui engendre l’amour, le don de soi, le sens du pardon, la paix, la joie et le témoignage. La foi ne se sépare pas de la charité, comme le dit saint Paul : « Ce qui importe, c’est la foi agissant par la charité » (Galates 5,6). Saint Jacques (2,17) est encore plus précis en disant : « Ainsi en est-il de la foi : si elle n’a pas les œuvres, elle est morte ».

6 La foi nous engage donc à servir ardemment notre prochain et à nous tourner vers Dieu : « La vie de foi se manifeste surtout par la participation à la vie sacramentelle et liturgique, ainsi que par une vie de prière constante » (Jean-Paul II aux évêques hollandais, 1983). Il faut en effet être nourri de Dieu pour pouvoir aimer à la manière de Dieu. Il faut boire à la source.

7 Pour mieux comprendre le sens de la foi, nous devons saisir le sens de la création. Pourquoi Dieu nous a-t-il crée ? Dieu est Amour. Il a créé l’homme par amour. Il a créé l’homme « à son image et à sa ressemblance » (Genèse 1,27), c’est-à-dire avec un esprit d’intelligence et de liberté, capable de le connaître, de recevoir son amour, de l’aimer et d’être uni à Lui. Plus encore, Il veut faire de nous ses fils. Il veut nous communiquer le bien le plus grand qui soit, sa propre vie divine, vie éternelle d’amour, de joie, de lumière, de sagesse. Ce don dépasse ce que nous pouvons imaginer. « Si tu savais le don de Dieu » (Jean 4,10) dit Jésus à la Samaritaine. En fait, nous avons été créés pour ce qu’il y a de plus grand pour une créature : vivre éternellement en intimité avec le Créateur.

8 Il y a cependant un obstacle à cette vocation : le péché. Il est entré dans le monde par la désobéissance et la prétention de l’homme. Le péché a instauré une séparation et une coupure entre l’homme et Dieu. Il empêche la réalisation du projet d’amour de Dieu sur les hommes. Pourtant, Dieu n’abandonne pas l’humanité à son péché. Il envoie un sauveur, Jésus-Christ, son Fils unique.  En souffrant et en mourant sur la croix, Jésus a voulu nous faire comprendre qu’il n’y avait pas de limites à l’amour de Dieu, qu’il prenait sur Lui le poids de nos fautes et qu’il venait pour réparer le mal de l’humanité toute entière.

9 Ainsi, grâce au sacrifice d’amour de Jésus-Christ, l’homme peut retrouver le chemin de la justice et de la sainteté. Par Jésus-Christ, l’homme est libéré du péché et retrouve sa véritable relation avec Dieu.

10 La foi nous permet de découvrir et d’accueillir tous ces mystères. En ce sens, elle nous permet de recevoir le salut qui vient ce Dieu. Dans l’Evangile, Jésus-Christ nous montre très souvent le lien qu’il y a entre le salut et la foi par cette petite phrase : « Ta foi t’a sauvé » (Luc 18,42 ; Marc 5,34 et 10,52). Les apôtres ont enseigné la même chose : « Il n’y a aucun salut ailleurs qu’en Lui (Jésus-Christ), car il n’y a pas sous le ciel d’autre nom donné aux hommes par lequel nous devons tous être sauvés ». (Actes des Apôtres 4,12). Et Jean-Paul II montre bien l’importance de ce qui est en jeu, en disant : « Ne pas croire veut dire exactement : refuser le salut offert à l’homme par le Christ ». Il ne s’agit pas d’une menace, ni d’un chantage, mais bien plutôt d’un cri d’amour, le cri d’un père qui veut donner le bonheur, un bonheur sans fin, à ses enfants.

11 Voilà à quoi sert la foi ! Cela dépasse infiniment l’aspect utilitaire à court terme. C’est notre bonheur éternel qui est en jeu, c’est notre bien le plus élevé. C’est aussi notre attitude par rapport à Dieu. La foi est un juste retour à notre Créateur et Père. Imaginons que nous refusions de reconnaître que notre père soit notre père et que notre mère soit notre mère. Quelle injustice ! Quelle violence faite au cœur de ceux qui nous ont aimé et nous ont donné la vie !

12 L’homme peut-il vraiment se passer de Dieu ? Ne peut-il pas découvrir au fond de lui-même une présence et dire comme saint Augustin : « Tu nous as faits pour Toi, Seigneur, et notre cœur est inquiet jusqu’à ce qu’il repose en Toi » (Les Confessions, Livre I, Ch. 1)

Stanislas GRYMASZEWSKI

 

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